Saviez-vous que la Corse et la Sardaigne n’étaient séparées que de quinze kilomètres ? C’est en remarquant cela sur une carte que l’idée germe dans la tête de Mi-raison : nous irons en Sardaigne depuis Marseille, sans avion ni voiture.
Quant à Mi-fugue, elle ignore tout de la destination, c’est une surprise pour son anniversaire ! Enfin… presque tout. Elle devine que nous partons vers le sud.
En partant de zéro, le plus difficile fut de déterminer l’itinéraire et de composer avec les transports. Mais vous allez voir, c’est finalement simple, pour un résultat doux et dépaysant. Et même s’il a plu, l’escapade nous a plu (ho ho !). Malgré le mauvais temps, nous avons passé du bon temps (hé hé !).
Notre itinéraire de Marseille à la Maddalena
Notre destination finale était la charmante petite île de La Maddalena, nichée dans l’ombre de la Sardaigne. Mais nos escales méritaient l’arrêt, en particulier Bonifacio (Corse) et Santa Teresa di Gallura (Sardaigne).
Portés par les flots à Porto-Vecchio
Notre ferry souhaite le bonsoir à Marseille et le bonjour à Porto-Vecchio. Nous avons plusieurs fois réalisé nos trajets vers la Corse de nuit et c’est toujours un plaisir d’ouvrir les yeux sur ses paysages.
Porto-Vecchio étant situé très au sud de la Corse, cela nous arrange bien pour la suite du trajet. La ville mérite une visite, mais ce sera sur le chemin du retour, nous devons avancer !
Bonifacio, la plus belle ville de Corse
En trente minutes, un bus nous dépose au cœur de Bonifacio. Ou plutôt à ses pieds, au niveau de la mer, à une bonne flopée de marches de la haute ville.
Dans les ruelles de la citadelle, l’ambiance est particulière. Marchands et restaurateurs s’agitent, époussettent, bricolent, repeignent en toute hâte avant le grand retour des touristes. Car l’île hiberne en basse saison, nous l’avions déjà remarqué en explorant la Corse du Nord à l’automne.
C’est de loin que Bonifacio révèle sa folie et son absence de vertige. D’ailleurs, cela ne se remarque peut-être pas, mais certaines maisons sont carrément situées au-dessus des flots. Glaglagla.
Et quels flots ! Ils n’attendent pas l’été pour donner envie de se baigner.
Ne tenant plus en place, nous nous élançons sur une randonnée un peu plus consistante, deux-trois heures de marche du côté du phare de la Madonetta et de la plage du Fazzio, pour des paysages corsément beaux.
Sur le chemin du retour, le coucher de soleil est un tel cadeau pour les yeux que même les goélands s’arrêtent en vol pour l’admirer.
Conseils pratiques sur Bonifacio
Bus depuis Porto-Vecchio
L’office de tourisme met à disposition les horaires des différentes compagnies ici.
Se loger à Bonifacio
Nous avons dormi dans un petit appart’ Airbnb de la haute ville, mais notez que c’est un privilège de la basse saison. Déjà parce que les logements sont rares, mais surtout parce que les prix déjà gonflés doublent en mai et triplent en juillet. Si vous tenez à dormir dans la citadelle, le Royal Hoteli varie moins que ses voisins et propose des prix honnêtes toute l’année.
Manger sur le pouce
Bonnes pizzas à la part chez Il Grano Bianco.
Santa Teresa Gallura, la Sardaigne du nord
Au petit-déjeuner, Mi-fugue saute de joie en apprenant que nous partons pour la Sardaigne. Plusieurs ferries traversent chaque jour le détroit en cinquante petites minutes. Au revoir les blanches falaises de Bonifacio…
… et bonjour aux rochers roses du nord de la Sardaigne !
Arrivés à Santa Teresa Gallura, nous sommes décontenancés. Sur un grand damier de ruelles désertes s’affrontent des centaines de maisons aux couleurs mal assorties. Ce n’est pas la plus harmonieuse des villes italiennes.
Néanmoins, le bout de la ville abrite une jolie petite plage, qu’un tracteur s’applique à rendre encore plus jolie. Ici aussi, l’île vit ses derniers jours de calme.
Capo Testa : les paysages les plus lunaires de Sardaigne
Si nous nous attardons à Santa Teresa di Gallura, c’est dans le but de découvrir la presqu’île du Capo Testa voisine. Il faut compter une quinzaine de kilomètres pour s’y rendre à pied, en faire le tour et rentrer. Évitez la route des voitures en grimpant sur la colline via la Strada Lu Patru, rapidement remplacée par un agréable chemin de terre.
La presqu’île du Capo Testa commence à se dessiner sous nos yeux.
À peine arrivés sur la presqu’île, nous sommes encerclés de touristes. Bon d’accord, leur nombre reste très raisonnable, mais Santa Teresa Gallura doit quand même être jalouse.
Une fois le village dépassé, nous comprenons mieux le succès du coin. La nature improvise ici toutes sortes d’empilements de roches sans queues ni têtes.
Nos cerveaux ne peuvent s’empêcher de scanner le décor à la recherche de formes connues, visages ou animaux, mais rien. Nous sommes dans un musée d’art abstrait à ciel ouvert, entrecoupé de jolies criques telle la Cala Spinosa.
Quand la mer est moins agitée, le reste de l’année, l’eau est réputée d’un turquoise éblouissant.
Nous optons pour un tour de la côte au hasard des cailloux. Conseil : ne faites pas comme nous. Les sentiers slaloment sur, sous et entre les rochers, sans repères. Revenez plutôt sur vos pas à la Cala Spinosa pour rejoindre la Cala Francese par un sentier stable. Vous découvrirez à la clé une magnifique crique dans un paysage déchiré, grandiose.
Atteindre la Valle della Luna est encore plus difficile. Il vaut mieux avoir de bonnes chaussures et des ancêtres chamois. Au loin, le sourire Colgate des falaises de Bonifacio se rit de nos galères.
Nous sommes accueillis dans la vallée par un grand totem et des mélodies mystérieuses. Un peu plus loin, une cérémonie semble se jouer avec des roseaux portés dans les airs. Tout cela est lunaire. Une communauté hippie est connue pour vivre ici toute l’année, à l’abri des rocs.
À part une légère allergie aux barbiers, ils ne chassent personne. Au contraire, ils vendent des bijoux aux touristes. Nous évitons tout de même de squatter trop longtemps leur salon, cuisine, salle de bain et temple à la fois.
Cette partie du Capo Testa est ravissante, mais ne vous tuez pas pour autant à essayer de la rejoindre si vous manquez d’énergie. Le décor autour du phare représente déjà une superbe découverte. Nous rentrons à Santa Teresa Gallura fatigués et éblouis, sous un soleil doré.
Conseils pratiques sur Santa Teresa Gallura
Ferry entre Corse et Sardaigne
La traversée se fait très simplement, avec plusieurs départs par jour au pied des murailles de la ville haute. Comptez 25€ en basse saison, 35€ en haute et 50 minutes dans les deux cas. Les véhicules sont acceptés. Réservation possible par icii.
Dormir à Santa Teresa
Nous avons dormi à la Rosa dei Ventii, une petite chambre d’hôtes impeccable à l’accueil attentionné, pour 65€ petit déjeuner compris.
Dîner à Santa Teresa
Nous avons adoré le restaurant PeMa, qui propose une cuisine originale (pour changer des pizzas) avec des options végétariennes. La carte tourne selon la saison, mais les aubergines fondantes était une tuerie, et les raviolis à la courge si savoureux que nous étions encore ravis au lit.
L’archipel de la Maddalena, collé à la Sardaigne
Cap sur notre objectif final, situé au nord de la Sardaigne lui aussi. Parmi les soixante-deux îles de l’archipel de la Maddalena, nous visons l’île principale, celle de la Maddalena. Sur cette île, nous dormons trois nuits dans la ville de la Maddalena. Et notre rue s’appelle… ah non.
Pour l’atteindre, nous admirons d’abord les paysages sardes à travers la vitre du bus pour Palau, puis sautons sur le dos d’un ferry (un jour c’est sûr, nous aurons testé tous les ferries de Méditerranée !) à l’assaut de notre île.
Le charme de la Maddalena (ville) ne se fait pas attendre. Imaginez des ruelles colorées, un port de plaisance, des pêcheurs qui cajolent leurs filets et de toutes petites voitures qui tût-tûtent.
En espions chevronnés, nous nous installons à la terrasse d’un café avec deux espressi en guise de camouflage. Notre mission incognito est un fiasco. Clients, serveuse, passants, tous se connaissent. Ils se saluent joyeusement, s’apostrophent aux quatre vents, crient avec les mains…
C’est le début d’un week-end de fortes rafales de vent, fréquentes dans la région si nous en croyons le nom de notre nouvel hôtel : Controvento (celui d’avant s’appelait Rosa dei Venti, il y a comme un thème !). Mais notre détermination est solidement accrochée.
Pour notre première balade, nous attrapons un pique-nique bien local : une grande chips plate appelée pane carasau, accompagnée d’un pot de crème d’artichaut. Et pour leur dégustation, nous grimpons vers l’ancien radar qui trône au sommet de l’île.
Cette vue ouvre notre appétit de découvertes. Alors nous partons, clopin-clopant, pour une grande boucle à l’ouest de l’île.
Ici encore, les rochers font le spectacle, entrecoupés de maquis fleuri. Nous restons un moment sur les hauteurs de la Maddalena avant de plonger vers la côte et de trouver notre crique préférée : belle vue, à l’abri du vent, avec le soleil pour nous réchauffer et des rochers en guise de chaises longues.
Nous sommes dans une zone appelée Cala Francese, en référence à des Français venus installer une carrière. Et si des Maddaléniens vous affirment que leurs pierres servent de socle à la Statue de la Liberté, permettez d’en douter. Une dizaine de carrières dans le monde soutiennent la même chose !
Au retour, nous passons par la Punta Tegge, réputée l’été pour ses couchers de soleil ainsi que pour le bar qui sert ses clients sur les rochers. Nous sommes seuls avec le vent, mais c’est un ravissement.
Le lendemain, nous sommes encore plus motivés. Mi-fugue compte souffler ses bougies après une grande balade sur l’île de la Caprera, reliée à la Maddalena par un pont. Nous commençons par attendre un bus… qui n’arrive jamais.
Nous revoyons alors nos ambitions et visons la toute petite île de Giardinelli à une heure de marche. Une colline, un chemin de terre, un supermarché et un stade de football plus tard, nous déboulons dans ce joli lieu peu construit, plein de roches biscornues et d’eaux transparentes.
Le lieu est connu pour son rocher emblématique surnommé « Tête de Poulpe » (testa di polpo), mais nous ne repérons pas le moindre encéphale de céphalopode.
Malgré la pluie qui s’invite, nous traînons de plage en plage, profitant de la délicate ambiance, avec le sentiment de visiter l’un des plus beaux rivages méditerranéen, mais sous une atmosphère plus mélancolique qu’idyllique !
Le ciel s’assombrit de minute en minute, nous forçant à rentrer illico presto. Il finit par nous recouvrir de grêle à quelques pas de l’hôtel. C’est sympa la Sardaigne, mais nous sommes peut-être arrivés quelques semaines trop tôt !
Conseils pratiques sur La Maddalena en Sardaigne
Venir à La Maddalena
Depuis Santa Teresa, la première étape est un bus de 40 minutes jusqu’à Palau. Nous avons utilisé la ligne 601 de la compagnie ARST qui s’attrape sur la Piazza Modesto. Tarif 2€50 dans un tabac, 3€50 à bord.
Puis, deux compagnies de ferry desservent La Maddalena, avec au minimum un départ par heure en basse saison. Durée de la traversée 16 minutes, 7€20 l’aller-retour (tarif basse saison). Les véhicules sont acceptés. Il n’est pas nécessaire de réserver en basse saison, mais méfiez-vous de la haute.
Dormir à La Maddalena
Nous avons logé à l’hôtel Controvento (~72€ petit déj compris)i situé en ville. Il manque un peu d’ambiance, cependant les chambres sont très confortables, parfaitement propres et le petit déjeuner pas mal du tout.
Prendre un spritz
Le barman de Vincanto est très doué en cocktails, qu’il est possible d’accompagner d’un aperitivo.
Manger à La Maddalena
Pour un panino à emporter en balade, foncez chez Cristal Bar. Ne vous fiez pas à son apparence de bouiboui, la gérante est super sympa et les sandwichs sont personnalisables.
Côté restaurants, beaucoup hibernent encore début avril et les autres ne baissent pas leurs tarifs l’hiver, contrairement aux hôtels.
La pizzeria Roby’s ne paie pas de mine, mais c’est une bonne adresse. Nos pâtes aux légumes étaient excellentes et les fondants en dessert, soit pistache soit chocolat, feraient fondre n’importe qui.
Nous avons aussi beaucoup aimé la pizzeria Civico49, avec plusieurs options vegan à la carte. Et nous recommandons fort le Meet Pub, qui sert d’énormes burgers ou sandwichs chauds accompagnés de patates au four, dans une ambiance jeune et joyeuse, avec des prix très corrects.
Se déplacer sur l’île de La Maddalena
Nous nous sommes compliqué un peu la vie en n’utilisant que… nos pieds. Nous ne souhaitions pas louer de voiture, mais comptions sur la location de vélo. Hélas, les loueurs de vélos (et même de scooters) étaient encore tous fermés. Le bus public Turmo Travel est censé permettre quelques trajets et nous l’avons vu passer le premier jour, mais pas le deuxième lorsque nous l’attendions.
Bref, à un autre moment de l’année, nous aurions traversé le pont vers l’île de Caprera, aux paysages réputés plus sauvages encore que ceux de la Maddalena. À pied, cela commençait à faire trop loin. Nous reviendrons !
Visiter le reste de l’archipel de la Maddalena
À la belle saison, de nombreuses agences proposent des tours de l’archipel de La Maddalena en bateau, avec pauses baignade. Vous pouvez trouver certaines offres par icii.
Retour à Marseille
Nous empruntons simplement le chemin en sens inverse, avec une petite surprise : notre ferry de Porto-Vecchio à Marseille se retrouve annulé. Dommage, nous comptions visiter le vieux centre-ville. Mais pas de panique, nous nous rabattons sur un autre ferry au départ de Propriano, dont nous admirons les contours depuis le ponton du bateau !
Nous nous éloignons tranquillement de la Corse et cueillons Marseille au lever de soleil.
Fin.
Ferry Marseille – Porto-Vecchio
Parmi le vaste choix de liaisons entre le continent et la Corse, celle qui dépose à Porto-Vecchio était la plus pratique pour la suite de notre promenade. La Méridionale opère cette liaison trois fois par semaine. Comptez 40€ par personne en basse saison, et ajoutez 50€ pour une cabine privée. Les prix explosent en haute saison.
Une alternative intéressante est la liaison Marseille – Propriano opérée par Corsica Linea. Le bus est juste plus long pour atteindre Bonifacio. Et pour ceux qui ne souhaitent pas transiter par la Corse, il existe un ferry Toulon – Porto Torres en Sardaigne, une fois par semaine.
Pour connaître les jours de traversées et comparer les tarifs, nous utilisons le site Direct Ferriesi.
Nous avons visité le nord de la Sardaigne en avril 2023.